Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Polipoterne est-il encore en vie ?
Polipoterne est-il encore en vie ?
Archives
29 novembre 2008

Un commercial d'enfer.

ermite

Bon, ça fait plus de six mois que cela dure. Il faut intervenir maintenant !

Le boss m’a accueilli ainsi, tout rouge comme d’habitude, mais énervé comme jamais. J’opinais timidement, les yeux baissés, pour donner mon approbation. Je savais déjà, qu’étant son meilleur commercial, la tâche de me rendre là-bas m‘incombait. Le dossier était déjà sur le bureau, de couleur rouge vif, indiquant les moyens quasiment illimités qu’accordait la bonne réalisation de cette affaire devenue prioritaire.

J’arrivais le jour même dans ce petit village ardéchois  appelé Rochemaure pour retrouver la personne à l’origine de tout ce fatras médiatique. Celui-ci trônait humblement en haut de la colline surplombant le Rhône, abrité seulement de quelques branchages feuillus qu’encerclaient quelques centaines d’individus assis en tailleur.

J’avais survolé une énième fois le dossier pendant le trajet, il était centré sur la transformation d’un jeune homme en ermite prêchant la paix et le retour aux valeurs humaines, condamnant tout gouvernement, tout acte qui ne soit pas axé sur la foi divine, dont lui, était le dépositaire par legs direct du tout puissant.

J’enjambais les disciples atones, esprits sans corps, reliés via l’ermite à une sphère de bien-être soufflée par une paille savonneuse fixée dans la bouche du seigneur. Je me plantais, sourire commercial, posture pleine d’aplomb, des phrases toutes prêtes, des contres objections organisées par organigramme. Je saluais ce « nouveau messie » et entamais notre conversation.

Je me présentais comme étant le représentant du consortium R&B  « Religion And Business » qui souhaitait lui racheter son fond de commerce. Je commençais par lui vanter ses qualités d’endoctrineur, tout en lui faisant comprendre les limites humaines de son avenir de Gourou, avec moult exemples d’échecs des ses prédécesseurs, pour en arriver à la traditionnelle somme d’un million d’euros, représentant le forfait classique de la fin de toutes activités religieuses au profit de ma société.

Un sourire las fut la seule réaction que j’obtinsse en réponse à ma proposition.

Je savais déjà que cela serait ainsi, je déroulais alors mon programme en lui proposant des parts de marché à hauteur de 1% de tous les gains qu’engendrerait la récupération de son église, en ayant, en cas de nouveau refus, encore la proposition de laisser l’entreprise à son nom et 20% de sa valeur en actions garanties sur cinq années.

La discussion ne fut ni âpre ni attentive, elle se transforma simplement en monologue, où les manques d’interventions, ne me permirent point de trouver de nouveaux arguments pour rebondir. Il ne résultat de mon démarchage aucun aboutissement, l’ermite garda de bout en bout ce sourire béat, imperméable à tout arrangement.

Mon cerveau s’éclaira enfin, et j’eus un sourire intérieur plus lumineux que jamais. Mes dernières propositions prenaient formes à mesure qu’elles sortaient de ma bouche aux dents éclatantes.

Je lui expliquais que j’étais convaincu par son idéologie et que j’étais prêt à y adhérer. Je rajoutais qu’ayant les pleins pouvoirs sur ce dossier, je ferais en sorte que sa doctrine serait publiée partout dans le monde, que nos actionnaires et clients qui représentaient environ 30% de la population mondiale auraient obligation de la partager, que chaque ville dépendant de R&B verrait une église, prêchant cette nouvelle foi, s’ériger. Tout ça à nos frais, bien sûr. L’ermite élargit alors son sourire, montra des dents aussi blanches que les miennes et signa le contrat après plusieurs lectures.

Tout en redescendant la colline, je pris mon téléphone portable pour donner le résultat de mon intervention au patron.

« Tout est OK, boss, les affaires reprennent, j’ai un contrat qui va permettre de relancer le bordel, on en a encore au moins pour 2000 ans »

Le patron devint encore plus rouge, se caressa les cornes, et tout en frétillant de sa queue fourchue, éclata de rire…

Publicité
Commentaires
M
Poli, tu viens de signer là un de tes meilleurs textes.<br /> Mais dis-moi à l'oreille : combien la transaction t'a-t-elle rapporté ?
F
C'était quand ?
B
Inutile donc que je refasse le déplacement?<br /> Balthazar
Polipoterne est-il encore en vie ?
Publicité
Publicité